Friday 31 July 2015

Et je me retrouvai ce jour-là à Gourma-Rharous...

       Etant une habituée du terrain, j’étais très enchantée de revoir Gourma Rharous après 8 ans d’absence dans ce coin perdu du Nord du Mali. (Eh oui! J’ai commencé à jouer la fière aventurière il y a longtemps! hihihihi) Coin perdu ? Oui. C’est vrai que la ville, que dis-je ! Le gros village situé sur la rive droite du fleuve Niger à l'Est de la région de Tombouctou est un chef-lieu de cercle et compte plus de 110000 âmes. Mais il n’en demeure pas moins un coin perdu coupé des villes environnantes  et du monde, sans route délimitée, sans eau ni électricité mais… rassurez-vous, Internet y est! 

C’est ainsi que deux jours après mon arrivée à Tombouctou je pris mon seul bagage et mon appareil photo pour m’enfoncer dans le Gourma malien. Aaahh j’étais contente hein! J’allais redécouvrir ces paysages désertiques vierges mais oh que grandioses et beaux! J’allais retrouver la vie de village, j’allais pouvoir interagir avec d’autres personnes d’autres cultures, recueillir beaucoup de témoignages concernant notre distribution de vivres et surtout prendre de belles photos, des portraits comme je les aime. Bref, c’était la fête dans ma tête.

A 11h nous étions déjà sur le bac, nous et les 4 et 6 cylindrées prêtes à ne faire du désert qu’une bouchée. Comme le disent les Anglophones, «we were ready to rock the desert!»



Ni les multiples secousses du trajet, ni les diverses crevaisons n’ont eu raison de ma bonne humeur sur la route. Après quatre bonnes heures de bataille contre le sable, je voyais paraître le fort de la ville au lointain.
 Nous étions arrivés sains et saufs. Un petit tour chez le maire de la commune comme le veut la coutume et hop! Nous étions sur le point de nous installer en attendant la distribution le lendemain. Pour des raisons de commodité, je décide de loger dans la famille de ma collègue qui d’ailleurs était surprise que je lui en fasse la demande. (Dans ma tête...Bah oui! Qu'est-ce que tu crois? Le terrain, ça me connaît!) 
Arrivés à destination, je descends avec mon sac à main, mon appareil photo ; je prends deux bouteilles d’eau minérale, deux sodas et …mon bagage! ??!... Mais où se trouve mon sac de voyage? Pourtant ce matin, je suis bien sortie de l’hôtel avec ! Et j’ai bien vu le chauffeur le mettre dans le coffre ? Où peut-il bien se trouver, ce fichu sac de voyage ???

Un collègue : Regarde encore, il doit bien se trouver quelque part…Ou peut-être que les autres l’ont descendu au campement… 

Moi : Mais je ne le vois nulle part ici dans le coffre ! J’espère bien qu’il est dans l’autre véhicule. 

Le collègue : Ok ce n’est pas grave, mais nous on doit y aller maintenant. On va chercher dans l’autre véhicule et on te fait signe.

Vous connaissez cette sensation  quand vous venez de perdre votre portefeuille ou votre téléphone…celle qui fait battre votre cœur à un rythme accéléré et vous fait vous sentir en insécurité morale… Eh ben je la sentais déjà monter en moi. Quelque chose n’allait pas, mais j’attendais de confirmer...
Je descends du véhicule, j’essaye de me calmer mais c’était presque impossible à ce moment. Tout ce que je voulais à ce moment précis, c’était mon sac de voyage. Et ma collègue D. qui me demandait de me calmer. Elle me proposait même d’aller prendre une douche en attendant une éventuelle nouvelle. Dans ma tête : « Chaiiiii! Non mais je rêve ! Elle me demande d’aller me doucher alors que je n’ai pas d’éponge, pas de savon et pas de serviette ? Comment vais-je me changer après la douche ? Elle se propose de me prêter un t-shirt mais elle ne va quand même pas oser me proposer un slip ?!!! Haaaannn !!!

Ayant compris que j’étais disposée à tout entendre sauf toutes les options qu’elle me présentait, elle se résolut donc à appeler le bureau de Tombouctou pour s’assurer que mon sac avait bien quitté avec les autres bagages. Je l’entends discuter en Sonrai avec son interlocuteur et après avoir raccroché m’annonce d’une voix calme comme à son habitude d’ailleurs :
« Ton sac est toujours à Tombouctou ; le chargé de la sécurité vient de vérifier. Ton sac et celui d’un autre collègue sont dans la grande salle du bureau. Quelqu’un a oublié de les charger dans la voiture. »

«QUOI ??? Non mais ! C’est pas possible quoi !! Mais pourquoi est-ce qu’ils avaient déchargé les sacs le matin quand on est passé au bureau???  Oh noooooon ! Nooon ! Nooon !!!! Là je fais quoi maintenant ?!!... »
Les interrogations se heurtaient dans mes méninges. J’étais abattue, frustrée.
La fatigue, ma peau qui collait du fait de la transpiration pendant toute la journée, ma tête et mes yeux qui me faisaient mal et les hormones aidant (oui, «les chinois» étaient mes hôtes!), j’ai pleuré un bon coup et curieusement, cela m’a permis de voir un peu plus clair dans mes idées. 

Le mal était déjà fait. Il fallait l’accepter et chercher une solution au plus vite. En plus je n’étais pas la seule dans la même situation. 

J’ai finalement pris cette douche dont je ne voulais pas entendre parler, enfilé le t-shirt emprunté et mangé du poulet. Loool! Comme quoi, on a beau s’énerver contre les autres et soi-même mais on ne peut se le permettre contre la bouffe ! (Un adage de chez moi…hihihihi)
Toujours avec l’aide de ma très chère collègue D. que je ne cesserai de remercier, j’ai pu me procurer la même nuit un nouveau pagne, une serviette et du papier hygiénique (pour le reste du séjour de mes chinois), du savon, du dentifrice et une brosse à dents dures à vous arracher les gencives et l'émail en un seul coup. Kiakiakiakiakia! Tout ce qu’il faut pour garder la tête hors de l’eau quoi!

C’est ainsi que j’ai pu ouvrir les yeux et apprécier ce nouvel environnement qui m’accueillait. En faisant ma chochotte de citadine, j'avais oublié que ceux qui vivent à Gourma-Rharous étaient aussi des êtres humains comme moi -la honte que j'ai ressentie après hein!-. J’ai fait ample connaissance de mes hôtes, de leurs voisins qui défilaient pour venir saluer les « Anan sar » -étrangers- qui étaient dans leurs murs, et c’est ainsi que j’ai fait la connaissance d’Agueichatou, une jeune maman sans grande histoire qui était venue accoucher auprès de sa mère et qui se préparait à retourner dans son foyer. La seule chose qui m’a attiré à lui demander de poser devant mon appareil était sa coiffure…
Elle est belle, n'est-ce pas?
Je me suis endormie et d'un sommeil profond, émerveillée de contempler le ciel avec ses milliers d’étoiles…Pour ceux qui sont encore sceptiques, je vous assure qu’il faut aller dans des lieux reculés, loin de toute civilisation de lampadaires, de nuisances sonores et de fumées étouffantes pour encore admirer ce spectacle de nos jours. Au moins deux étoiles filantes sont passées et j’ai fait un vœu -j'attends toujours qu'il se réalise waiii!.


Les jours suivants à Gourma-Rharous sont passés sans grand ambages. La distribution de vivres était un succès, le temps était idéal pour de belles photos, j’ai pris plaisir à me balader sur les bords du fleuve où j’ai admiré le coucher du soleil, j’ai même eu mon moment de méditation au pic d’une dune ! lol !


Mon bagage, je l'ai finalement reçu la veille de notre retour à Tombouctou. En somme, j'ai survécu sans pendant la période. Eh oui, la vie nous apprend des leçons de vie hors de prix aux endroits et quand on s’y attend le moins. Maintenant plus que jamais, je suis prête à reprendre la route, peu importe la destination ou que je n’aie pas mon sac. Je reste plus que convaincue que les voyages nous apprennent beaucoup sur les autres mais surtout sur nous-mêmes, êtres égoïstes et égocentriques que nous sommes. Comme le dit un ami à moi : « Cela rend modeste de voyager. On voit quelle petite place on occupe dans le monde!!»

Et vous, les ami(e)s? Avez-vous déjà vécu une situation similaire? Comment l'avez-vous gérée? Dites-moi tout! 

A très vite!

Ayaba